Clauses contractuelles - Capita Selecta

Ces dernières années, un certain nombre de nouvelles lois ont été adoptées et ont une incidence sur la rédaction des contrats commerciaux, comme l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2023, du livre 5 du nouveau Code civil (CC), ainsi que le Deal pour l’emploi et d’autres lois en matière de droit du travail.

L’un des défis pour les entreprises est donc de s’assurer que la rédaction et la négociation des contrats commerciaux et des contrats de travail tiennent compte de cette nouvelle législation. Nous vous proposons de découvrir ci-dessous quelques-unes des nouvelles dispositions les plus importantes, afin que vous puissiez en tenir compte lors de la négociation et de la rédaction des contrats, et apporter les ajustements nécessaires aux contrats existants.

Droit du travail - Actualités en matière de contrats de travail et de réglementation du travail

Droit du travail - Modifications des contrats de travail

La Loi du 7 octobre 2022 relative aux conditions de travail transparentes et prévisibles vise à améliorer les conditions de travail en rendant le travail plus transparent et plus prévisible, tout en garantissant la flexibilité du marché du travail.  

Un premier pilier de cette loi concerne le droit à l'information concernant certaines conditions d'emploi individuelles et collectives essentielles pour les employés des secteurs privé et public (y compris les fonctionnaires statutaires). Il s'agit notamment de l'identité des parties, du lieu de travail, de la fonction et du titre, du grade, de la capacité ou de la catégorie, de la date d'entrée en fonction, de la date de fin ou de la durée prévue de la relation de travail dans le cadre d'une relation de travail à durée déterminée, du salaire (avec indication séparée des avantages) et des règles relatives à l'horaire (fixe/variable). Le travailleur qui doit travailler dans un autre pays pendant plus de quatre semaines doit également recevoir les informations suivantes avant son départ : le ou les pays où le travail doit être effectué et sa durée prévue ; la devise dans laquelle la rémunération doit être versée ; les avantages en espèces ou en nature associés à la ou aux missions de travail et les informations concernant le retour du travailleur. Si le travailleur est détaché dans un État membre de l'UE, les informations suivantes doivent également être communiquées : le salaire auquel le travailleur a droit en vertu de la législation applicable dans l'État membre d'accueil ; toute indemnité liée au détachement et toute disposition relative au remboursement des frais de voyage, de séjour et de repas, ainsi que le lien vers le site web national officiel de l'État membre d'accueil. Ces informations doivent être fournies au travailleur au plus tard le premier jour de travail ou avant son départ pour un autre pays.  

La manière dont les informations susmentionnées doivent être fournies n'est pas prescrite par la loi. Elles peuvent être mentionnées dans le contrat de travail écrit ou dans sa version numérique ou dans un document ad hoc, pour autant qu’elles puissent être facilement conservées et imprimées par l'employé et l'employeur. En cas de modification des informations communiquées, l'employé doit être informé de cette modification au plus tard le jour de l'entrée en vigueur de la modification, sauf en cas de modification des dispositions légales ou réglementaires ou des relations collectives de travail auxquelles le document en question se réfère. 

Une autre nouveauté de cette loi est l'interdiction de principe pour l'employeur d'interdire aux employés d'avoir un deuxième emploi, ou de traiter les employés qui ont un deuxième emploi de manière plus défavorable (sauf si la loi l'autorise). Il n'est donc plus possible d'inclure une clause d'exclusivité stricte. En revanche, il est possible d’exiger des salariés qui occupent ou souhaitent occuper un second emploi qu’ils en informent l'employeur. Bien entendu, les activités concurrentes restent également interdites. Les accords relatifs à un deuxième emploi peuvent donc toujours être inclus dans le contrat de travail ou dans un avenant à celui-ci.

Une autre innovation intéressante est la Loi du 20 mars 2023 qui modifie la Loi concernant l'introduction d'un statut unique entre ouvriers et employés en ce qui concerne les délais maximaux de préavis. En cas de démission du salarié, le délai de préavis ne pourra jamais dépasser 13 semaines. Cette règle s'appliquera à tous les salariés qui démissionnent, quelle que soit la catégorie salariale à laquelle ils appartiennent (la distinction entre employés supérieurs ou non sera supprimée à cet effet). La loi ne modifie pas le calcul du délai de préavis en cas de licenciement par l'employeur. La loi entrera en vigueur à partir du 28 octobre 2023 et s'appliquera aux licenciements notifiés après son entrée en vigueur.

Droit du travail - Modifications des règlements de travail

Avec le Deal pour l'emploi, des règles plus claires sont désormais établies pour garantir une prévisibilité minimale des horaires de travail dans le cas d'horaires variables pour les travailleurs à temps partiel.  

Tout d'abord, le règlement de travail doit explicitement fixer les heures de travail hebdomadaires fixes ou les heures de travail hebdomadaires moyennes, ainsi que la période de référence. L’horaire de travail doit être notifié au moins sept (7) jours ouvrables (et pas moins de cinq (5) jours) à l'avance (sauf si ce délai a été modifié par une convention collective généralement contraignante qui respecte un délai minimum de 3 jours ouvrables) par les canaux de communication habituels de l'entreprise.  

Le Deal pour l'emploi prévoit en outre la possibilité d'une semaine de travail de quatre jours, c'est-à-dire de travailler à temps plein quatre jours au lieu de cinq. C'est l'employé qui doit en faire la demande. L'employeur pourra soit accepter la demande, soit la refuser en la justifiant. Si la semaine de quatre jours est possible, elle doit être prévue dans le règlement du travail pour les semaines de travail allant jusqu'à 38 heures, et dans une convention collective d'entreprise pour les semaines de travail allant de 38+ à 40 heures.

Une autre nouveauté, pour les entreprises de plus de 20 salariés, concerne le droit à la déconnexion, prévu par la Loi du 26 mars 2018 visant à renforcer la croissance économique et la cohésion sociale, dans le but d'établir des règles de base autour du droit du salarié à ne pas se connecter en dehors des heures de travail par le biais de dispositifs numériques professionnels (téléphone mobile, smartphone, ordinateur portable, etc.). Les entreprises devraient également proposer des formations/sensibilisations à ce sujet. Si le secteur n'a pas fixé de règles, les entreprises doivent le faire elles-mêmes, par le biais d'une convention collective d'entreprise ou, à défaut, dans le règlement du travail.

Enfin, la Loi du 30 octobre 2022 portant des dispositions diverses relatives à l'incapacité de travail prévoit que le travailleur n'est pas tenu de présenter un certificat médical pour une incapacité d'un jour (ou pour le premier jour d'une période d'incapacité de travail plus longue) au maximum trois fois par an. Les entreprises qui emploient moins de cinquante (50) travailleurs au 1er janvier de l'année civile au cours de laquelle l'incapacité survient peuvent déroger à cette exemption par le biais d'une convention collective d'entreprise ou d'un règlement du travail.

Droit civil - L'application ratione temporis du livre 5 du nouveau Code civil (CC), phase précontractuelle du contrat et des articles IV.2/1 et VI.91/3 et suivants du Code de Droit Economique (CDE)

Code civil - Ratione temporis

Quand est-ce que les dispositions du nouveau livre 5 du Code civil, entré en vigueur le 1er janvier 2023, s’appliqueront-elles aux contrats ?

En principe, le nouveau Livre 5 du Code civil s'applique aux actes juridiques et aux faits juridiques qui ont eu lieu après son entrée en vigueur le 1er janvier 2023. Les contrats conclus à partir du 1er janvier 2023 seront donc soumis aux nouvelles dispositions.

Toutefois, à moins que les parties n'en aient convenu autrement, les anciennes règles continueront à s'appliquer :

  1. Aux effets futurs des actes juridiques et aux faits juridiques survenus avant l'entrée en vigueur de la présente loi (c'est-à-dire avant le 1er janvier 2023) ;
  2. Aux actes juridiques et aux faits juridiques qui ont eu lieu après l'entrée en vigueur de la présente loi (c'est-à-dire après le 1er janvier 2023) mais qui se rapportent à une obligation découlant d'un acte juridique ou d'un fait juridique qui a eu lieu avant l'entrée en vigueur de la présente loi (c'est-à-dire avant le 1er janvier 2023).

Exemple :

Ancien Code civil
(Sauf si les parties en ont convenu autrement)

Livre 5 du Code civil

Résiliation avant le 1er janvier 2023 d'un contrat conclu avant le 1er janvier 2023.

Conclusion d'un nouveau contrat après le 1er janvier 2023.

Résiliation après le 1er janvier 2023 d'un contrat conclu avant le 1er janvier 2023.

Actes juridiques unilatéraux après le 1er janvier 2023.

Réalisation après le 1er janvier 2023 d’une condition résolutoire prévue dans un contrat conclu avant le 1er janvier 2023.

Rupture de contrat postérieure au 1er janvier 2023 pour un contrat conlcu après le 1er janvier 2023.

Prorogation après le 1er janvier 2023 d'un contrat conclu avant le 1er janvier 2023.

 

Renouvellement après le 1er janvier 2023 d'un contrat conclu avant le 1er janvier 2023.

 

La conclusion d'un avenant après le 1er janvier 2023 qui modifie un contrat existant conclu avant le 1er janvier 2023.

 
Paiement après le 1er janvier 2023 d'une obligation datant d'avant le 1er janvier 2023.  

Uitvoeringscontract (bv. koop/verkoop) afgesloten na 1 januari 2023 in uitvoering van een kaderovereenkomst (bv. een distributieovereenkomst) afgesloten vóór 1 januari 2023.

 
Contrat d'exécution (par exemple d’achat/vente) conclu après le 1er janvier 2023 en exécution d'un accord-cadre (par exemple, accord de distribution) conclu avant le 1er janvier 2023.  

Mais qu'en est-il lorsqu’ un contrat est renouvelé avec des modifications limitées après le 1er janvier 2023 et que ce contrat contient la clause de forme suivante : « le présent accord annule et remplace l'accord précédent » ?  Bien qu'en principe, l'ancien Code civil s'applique aux renouvellements, aux extensions ou même aux modifications de contrats existants conclus avant le 1er janvier 2023, cette clause peut être interprétée comme exprimant l'intention des parties de créer un nouvel acte juridique indépendant de tout acte juridique antérieur ; conduisant ainsi à la conclusion logique que les dispositions du Code civil s'appliquent au contrat renouvelé. Par conséquent, pour éviter tout doute, il est préférable de choisir expressément d'appliquer le Code civil dans de telles circonstances.  

Quid si les parties poursuivent l'exécution d'un contrat à durée déterminée conclu avant le 1er janvier 2023 et se terminant après le 1er janvier 2023 ? Si l'on suppose que dans ce cas (comme le confirme désormais expressément l'article 5.78 du Code civil) la conséquence de cette poursuite est que le contrat est prolongé à l'identique mais pour une durée indéterminée, alors l'ancien Code civil continue de s'appliquer.

Code civil - Phase précontractuelle de conclusion d’un contrat

Lors de la négociation d'un nouveau contrat après le 1er janvier 2023, la phase précontractuelle du contrat doit dûment être prise en compte. En effet, la liberté de conclure des contrats et la formation dynamique des contrats sont désormais explicitement incluses dans les articles 5.14 et 5.15 du Code civil, et il est important que le processus menant à la conclusion ou au refus d'un contrat soit mené de bonne foi. De plus, durant cette période précontractuelle, l'échange d'informations correctes et complètes est désormais également codifié comme une obligation (article 5.16 du Code civil).

Si une partie (i) rompt les négociations de manière incorrecte ou (ii) ne fournit pas/détient pas les informations nécessaires, elle peut engager sa responsabilité extracontractuelle (article 5.17 du Code civil).

La partie lésée peut (i) en cas de rupture erronée des négociations, demander à être placée dans la situation dans laquelle elle se serait trouvée si les négociations n'avaient pas eu lieu (c'est-à-dire que la partie lésée peut réclamer les coûts des négociations et, si les conditions en sont réunies, une indemnité pour la perte de l'occasion de conclure un contrat avec un tiers); et (ii) plus encore, si, au cours des négociations, une attente légitime a été créée que le contrat serait conclu sans aucun doute, réclamer le recouvrement de la perte des bénéfices nets attendus du contrat non conclu. Des accords préalables clairs confirmant la nature non contraignante des négociations et prévoyant le formalisme nécessaire à la conclusion d'un contrat (c'est-à-dire l'exigence d'un accord écrit signé) peuvent donc s'avérer utiles.

Le manquement à l'obligation d'information, peut entraîner la nullité du contrat si les conditions prévues à l'article 5.33 du Code civil sont remplies (c'est-à-dire les vices de consentement). Dans ce dernier cas, des clauses explicites et claires dans le contrat, dans lesquelles les parties confirment qu'elles ont demandé toutes les informations nécessaires et que ces informations ont été obtenues, peuvent également s’avérer utiles. 

Code civil - Dispositions relatives aux clauses abusives et à l'abus de dépendance économique

En outre, les dispositions relatives aux clauses abusives (art. 5.23, 5.38 et 5.52 du Code civil et VI.91/3 et suivants du CDE), à l'abus de dépendance économique (art. IV.2/1 du CDE) et aux circonstances (art. 5.37 du Code civil) ne doivent pas être négligées lors de la rédaction/négociation des contrats. À cette fin, il est utile de prévoir des clauses indiquant que les parties ont conclu le contrat sur la base de tous les documents requis et des informations communiquées de bonne foi, que le contrat a été négocié en toute connaissance de cause et que les parties ont pu parvenir à un accord équilibré et négocié sur les différentes dispositions. L'application de conditions générales reste bien entendu possible, mais les dispositions devront être équilibrées pour prévenir le risque de nullité.

Droit civil - Imprévision - Résiliation anticipée - Clause indemnitaire - Clause d'exonération

Code civil – l’Imprévision

Suite à la pandémie de COVID-19 et à la guerre en Ukraine, la question de l'application éventuelle d'une clause de force majeure et de la nécessité éventuelle d'une clause de « hardship » (changement de circonstances) a déjà fait l'objet de nombreuses discussions.

Le Code civil prévoit désormais explicitement, outre la force majeure (art. 5.226 du Code civil), une disposition de changement de circonstances (art. 5.74 du Code civil) qui permet aux parties de renégocier un contrat si l'exécution des obligations contractuelles devient très onéreuse en raison de la survenance de circonstances qui n'étaient pas prévisibles lors de la conclusion du contrat et qui ne sont pas imputables au débiteur qui s'en prévaut. Bien que cette disposition soit de droit supplétif et qu'il y ait une tendance à l'exclure par contrat, il est préférable d'analyser le bénéfice de la renégociation pour chaque partie pour chaque contrat à conclure.

Par exemple, en cas de force majeure définitive entraînant une résiliation, la partie exécutante devra supporter elle-même les coûts de la situation de force majeure et perdra en même temps son droit au paiement du prix pour l'exécution de ses obligations. L'autre partie (payante) ne pourra pas réclamer d’indemnité contractuelle et perdra également le bénéfice de l'exécution du contrat. Les deux parties sont donc perdantes.

Si les parties prévoient contractuellement de renégocier l'accord dans des circonstances exceptionnelles (qui entraînent des coûts plus élevés), elles ont la possibilité de mieux répartir les risques défavorables entre elles et de maintenir l'accord. Elles ont ainsi la possibilité de créer une situation gagnant-gagnant.

Pour qu'une clause de hardship prenne tout son sens, il est donc recommandé de prévoir une répartition explicite des risques dans le contrat en modulant les risques et les conséquences juridiques de la réalisation de ces risques en fonction de la relation contractuelle.

L'exclusion de l'article 5.74 du Code civil sur la base d'une clause « boiler-plate » entraine le risque que cette clause soit déclarée nulle en vertu des règles relatives aux clauses abusives et/ou à l'abus de droit et/ou à l'abus de dépendance économique.

Code civil - Résolution anticipée - exceptio timoris

C'est souvent un réflexe automatique pour une partie tenue de suivre la bonne exécution des contrats, lorsqu'elle est confrontée à une inexécution de l'autre partie, de choisir entre l'application du remède provisoire de l'exceptio non adimpleti contractus (ENAC) par lequel elle suspend sa (ses) propre(s) exécution(s), ou le remède final de la résolution.

Avec l'entrée en vigueur du nouveau Code civil, un nouveau moyen de pression est ajouté : celui de la résolution anticipée (art. 5.90 al. 2 du Code civil). Cette disposition légale sera applicable dans des circonstances exceptionnelles, lorsque le créancier se rend compte, avant même la date convenue pour l'exécution des obligations, que celle-ci n'aura pas lieu ou lorsqu'il a de bonnes raisons de le craindre. L'inexécution du débiteur n'aura pas encore eu lieu et ne sera donc pas encore exigible. Ces « bonnes raisons » sont à la fois des raisons objectives (incendie, grève, problèmes de paiement avec d'autres fournisseurs, faillite...) et des raisons subjectives (le cas incontesté où le débiteur lui-même déclare expressément qu'il n'exécutera pas (plus) ses obligations).

Le créancier ne pourra pas résoudre le contrat du jour au lendemain. Ainsi, les conséquences de l'inexécution doivent être suffisamment graves pour le créancier, qui doit également mettre en demeure le débiteur et lui donner un délai raisonnable pour fournir des garanties suffisantes à la bonne exécution de ses obligations. Par conséquent, pour assurer une application efficace de la résolution anticipée, il est utile de prévoir une clause d'application dans le contrat lui-même, précisant les circonstances exceptionnelles par les parties ainsi que le délai de préavis.

Les avantages de la nouvelle possibilité de résolution anticipée résident dans l'optimisation et la limitation des dommages dans les transactions commerciales : un vendeur sera plus prompt à chercher un autre acheteur et un acheteur pourra s'approvisionner plus rapidement ailleurs. Un exemple concret permet d'illustrer ce propos : une entreprise qui commande un composant essentiel pour sa production d'équipements médicaux en période de difficultés économiques est confrontée à un fournisseur qui, compte tenu de la pénurie, conclut un accord plus lucratif avec un autre acheteur et ne craint pas de devoir payer des dommages-intérêts à l'entreprise. L'entreprise qui en prend connaissance voudra, compte tenu de ses besoins de production, agir le plus rapidement possible : en invoquant cette possibilité légale (qu'elle soit ou non élaborée dans une clause contractuelle), elle pourra se délier de l'accord avec ce fournisseur et en trouver un nouveau dans les plus brefs délais.

Ceux qui souhaitent procéder de manière moins radicale peuvent également décider de ne pas procéder immédiatement à la résolution mais à une suspension, en invoquant l'article 5.239 §2 du Code civil, l'exceptio timoris selon laquelle « Le créancier peut aussi suspendre l'exécution de son obligation lorsqu'il est manifeste que son débiteur ne s'exécutera pas à l'échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour lui. Le créancier ne peut plus suspendre l'exécution de son obligation si le débiteur donne des assurances suffisantes de la bonne exécution de la sienne ».

Code civil - Clause indemnitaire

L'article 5.88 du Code civil codifie les conditions auxquelles une clause indemnitaire doit satisfaire. Tout d'abord, il doit y avoir une violation du contrat imputable au débiteur (à la fois l'inexécution et le retard dans l'exécution). Ensuite, les parties doivent prévoir une somme forfaitaire (par exemple, le paiement d'une somme d'argent ou d'un intérêt) ou la fourniture d'une certaine prestation (par exemple, la restitution de certains biens) en réparation de tous les types de dommages (dommages directs ou indirects, moraux, matériels ou financiers). L'intérêt est qu'une fois l'indemnité ou la prestation fixée, le créancier n'a plus à prouver l'existence ou l'étendue de son dommage et les deux parties savent à l'avance ce à quoi elles ont droit ou ce à quoi elles sont obligées en cas d'inexécution.

La deuxième phrase de l'article 5.88 du Code civil prévoit cependant en une limitation : une fois que l'indemnisation/exécution est fixée dans une clause indemnitaire, le créancier ne peut plus réclamer une indemnisation supérieure ou inférieure. Cela signifie-t-il que l'ajout classique « sans préjudice du droit du créancier de réclamer une indemnisation pour ses dommages réels » n'est plus possible ? En principe, le créancier ne peut pas réclamer une indemnisation pour ses dommages réels s'ils dépassent ce qui est stipulé dans la clause indemnitaire. Ce qui n'est plus possible non plus, c'est l'affirmation selon laquelle la clause indemnitaire agit comme une sorte d'indemnisation minimale que le créancier peut invoquer en cas de défaillance du débiteur, même s'il ne peut pas prouver le dommage réel. Il convient de noter que cette disposition est de droit supplétif. Par conséquent, les parties peuvent s'en écarter, par exemple en prévoyant contractuellement la phrase ci-dessus et en ajoutant que des dommages-intérêts plus élevés peuvent être réclamés si des dommages plus élevés peuvent être prouvés.

Là encore, l'application de l'article 5.88 du Code civil est subordonnée à une mise en demeure préalable. En outre, les règles régissant le choix entre les sanctions et le cumul des sanctions sont également valables pour la clause indemnitaire (c'est-à-dire que le créancier peut choisir d'exiger l'exécution en nature de l'obligation au lieu d'exercer la clause indemnitaire).  

La nouveauté réside dans la clarification du pouvoir du juge de réduction lorsque le débiteur est confronté à une clause indemnitaire déraisonnable. Contrairement à l'ancien Code civil, où le juge devait déterminer (a posteriori) le dommage potentiel au moment de la conclusion du contrat, ce qui est un exercice difficile voire impossible, il doit désormais prendre en compte le « dommage et de toutes les autres circonstances, en particulier des intérêts légitimes du créancier. » Ainsi, le juge doit évaluer une « déraisonnabilité manifeste » en tenant compte du dommage réel et potentiel, ainsi que de toutes les autres circonstances, telles que l'intérêt à éviter une nouvelle inexécution, la nature du contrat, la gravité de l'inexécution, la situation du débiteur et les intérêts légitimes du créancier.  

L'alinéa 3 de l'article 5.8 du Code civil prévoit une limite inférieure à cette réduction : ainsi, en cas de stipulation d'un intérêt pour retard pour le paiement d'une somme d'argent, le juge ne pourra pas condamner le débiteur à payer un taux d'intérêt inférieur au taux d'intérêt légal. Si la Loi du 2 août 2002 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales est d'application, le taux d'intérêt prévu par cette loi sera la limite inférieure.

Si le débiteur a partiellement exécuté ses obligations, le tribunal en tiendra compte lors de la demande de réduction et réduira la clause indemnitaire proportionnellement à cette partie de l'obligation qui n'a pas été exécutée.  

Que se passe-t-il si une clause indemnitaire est jugée illicite ?  Le tribunal pourra-t-il encore l'atténuer ? Ou doit-elle être considérée comme nulle et non avenue ?

Lorsqu'une clause indemnitaire est incluse dans un contrat de consommation, l'entreprise devra veiller à ce que la clause indemnitaire soit réciproque : par exemple, le consommateur a droit à une indemnisation du même ordre lorsque l'entreprise n'exécute pas ses obligations. Ainsi, une clause indemnitaire doit prévoir à la fois une indemnisation lorsque le consommateur n'exécute pas ses obligations et une indemnisation lorsque l'entreprise n'exécute pas ses obligations. Seulement prévoir une indemnisation lorsque le consommateur n'exécute pas ses obligations est illicite au sens de l'article VI.83, 17° du CDE.   

Vu que les obligations du consommateur et celles de l'entreprise ne sont souvent pas analogues, il n'est pas obligatoire que la clause indemnitaire prévoie en une indemnisation identique. Il importe seulement que l’indemnisation soit équivalente : une indemnisation du même ordre, en fonction du dommage potentiel (art. VI.83, 24° du CDE). Ainsi, on peut prévoir une sanction plus légère pour un champ d'application « léger » et une sanction plus importante pour un champ d'application « plus important ». Toutefois, les sanctions doivent être proportionnées. La sanction est la nullité prévue à l'article VI.83 du CDE et non l'atténuation de l'article 5.88 du Code civil (lex specialis).  

Le même raisonnement peut-il être appliqué aux contrats entre entreprises ? Le Code de droit économique ne prévoit pas d'obligation de réciprocité et de proportionnalité similaire à celle des contrats de consommation. Toutefois, il faudra tenir compte de l'interdiction des clauses qui sont manifestement disproportionnées et créent donc un déséquilibre manifeste entre les parties (article VI.91/3 du CDE) ainsi que de l'interdiction de la dépendance économique abusive (article IV.2/1 du CDE).  Là encore, la sanction sera la nullité et non une réduction.  

Code civil - clause d’exonération

Enfin, la clause d’exonération. Avec l'entrée en vigueur de l'article 5.89 du Code civil, il est clairement établi dans quelles hypothèses l’on peut exonérer sa responsabilité.   

Tout d'abord, en vertu de l'article 5.89 du Code civil (droit commun), on ne peut s'exonérer de sa responsabilité pour ses propres fautes intentionnelles et celles de son mandataire. On peut s'exonérer en cas de faute grave, mais cela doit être explicitement prévu dans le contrat.

Toutefois, des règles plus strictes s'appliquent aux contrats avec les consommateurs et aux contrats entre entreprises en vertu des dispositions du Code de droit économique (lex specialis) :

Dans un contexte B2C, les règles de l'art. VI.83.13° du CDE prévoient qu'une entreprise ne pourra pas s'exonérer de sa responsabilité du fait de son dol ou de sa faute lourde à l’égard d’un consommateur. Ceci vaut aussi pour les préposés ou mandataires de l’entreprise. En outre, l’entreprise ne pourra pas s'exonérer de sa responsabilité en cas d'inexécution d'une obligation constituant en une des prestations principales du contrat (sauf cas de force majeure).  

Dans un contexte B2B, des règles dérogatoires sont également prévues à l'article VI.91/5, 6° du CDE. Ainsi, une entreprise ne pourra pas s'exonérer vis-à-vis d'une autre entreprise du fait de son dol, de sa faute grave ou de celle de ses préposés. Une entreprise peut donc s'exonérer de sa responsabilité pour les fautes des mandataires ou agents indépendants vis-à-vis d'une autre entreprise (ce qui n’est pas possible vis-à-vis d'un consommateur). De même, comme dans un contexte B2C, l'entreprise ne pourra pas s'exonérer de sa responsabilité du fait de toute inexécution des engagements essentiels qui font l'objet du contrat (sauf cas de force majeure).  

Deuxièmement, une clause d’exonération ne doit pas vider le contrat de sa substance ou violer les règles d'ordre public et de droit impératif. En l'occurrence, il est logique qu'une entreprise qui prend des engagements contraignants ne puisse pas s'affranchir de toute responsabilité et certainement pas des dispositions légales impératives et des engagements essentiels qui font l'objet du contrat.

Enfin, il existe une interdiction générale d'exonération d’une faute causant une atteinte à la vie ou à l'intégrité physique d'une personne. Cette interdiction s'applique aussi bien aux personnes dont il répond, qu’aux préposés et aux agents indépendants.

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